Madame LALAHARINIVO Laurette, directrice des réformes législatives à Madagascar, répond aux questions de Grandir Dignement

 Congrès Mondial de la Justice Juvénile à Genève du 26 au 30 janvier 2015

QUESTIONNAIRE SUR LA COOPÉRATION ENTRE LE MINISTÈRE DE LA JUSTICE DE MADAGASCAR ET L’ASSOCIATION GRANDIR DIGNEMENT

DRL

 

 

 

 

 

 

 

  • I. Pouvez-vous vous présenter a nos lecteurs en leur expliquant vos fonctions au sein du Ministère de la Justice à Madagascar ? 

    Mon nom est LALAHARINIVO Laurette, je suis Magistrat et actuellement, j’exerce la fonction de Directrice des Reformes Législatives au sein du Ministère de la Justice, fonction qui m’a été confiée depuis maintenant 14 ans. Aussi vu ce temps passé à la tête de cette Direction, j’ai rencontré depuis beaucoup de difficulté dans l’exécution de mon travail consistant à élaborer et à faire adopter les différentes lois concernant le fonctionnement de la Justice ainsi que les textes ayant trait au droit, mais également des satisfactions face aux réussites dans l’élaboration et l’adoption desdites lois. 

    Il faut également préciser que le travail au sein de la DRL, formée par une équipe de Magistrats et de personnel très soudée, consiste surtout à mettre la législation nationale en conformité avec les instruments internationaux ratifiés par Madagascar, dont notamment les droits des enfants. En effet, la DRL est la Direction chargée de tout ce qui a trait aux droits des enfants au sein du Ministère de la Justice et est ainsi chargée du secrétariat technique de la Commission de Réforme des Droits des Enfants (CRDE), commission multidisciplinaire chargée d’examiner les reformes relatives aux droits des enfants, composée de représentants des Ministères concernes ainsi que de la Société civile et des Partenaires techniques et financiers.

  • II. Comment avez-vous connu Grandir Dignement ?L’Association « Grandir Dignement » est une association qui a depuis 2009 œuvré auprès des enfants en conflit avec la loi en détention à Madagascar, pour faire respecter les droits des enfants même s’ils sont privés de liberté, et de ce fait, Grandir Dignement a déjà travaillé avec le Ministère de la Justice dans le cadre de l’Administration pénitentiaire en vue de leur réinsertion sociale. Et c’est ainsi que la Direction des Reformes Législatives a été mise en contact avec l’association, étant donné que la cohérence doit être de mise dans la mise en place d’un cadre juridique adéquat.

    La DRL travaille également étroitement avec l’association dans la mise en œuvre du dispositif de liberté surveillée, mesure prévue dans le texte régissant les enfants en conflit avec la loi en vigueur

  • III. En quoi consiste votre collaboration ?Comme précisé précédemment, nous travaillons étroitement avec l’association « Grandir Dignement » dans la mise en place de mesures alternatives à la détention, et notamment dans la mise en œuvre de la mesure de liberté surveillée. L’Association fournit les éducateurs spécialisés, avec l’appui de l’Union Européenne, lesquels éducateurs sont sous la supervision des juges des enfants, à qui ils doivent rendre compte de l’évolution de la situation de l’Enfants en Conflit avec la Loi (ECL). Actuellement des rencontres de sensibilisation sont organisées avec les acteurs tels que les Avocats, les Officiers de Police Judiciaire, mais également auprès du public ; il en est ainsi des activités organisées lors de la célébration de l’anniversaire de la Convention relative aux Droits de l’Enfant consistant à la présence des juges et des éducateurs a des portes ouvertes au public et a des expositions relatives aux activités réalisées au bénéfice des ECL.
  • IV. Que pensez-vous du travail mené par Grandir Dignement à Madagascar ?Jusqu’à maintenant, je pense que Grandir Dignement fait un bon travail et même un travail formidable a Madagascar pour garantir aux enfants entrant dans le système judiciaire, et également pour la mise en œuvre de la mesure de liberté surveillée qui a été prévue par le texte régissant les ECL datant de 1962 mais jamais appliquée depuis, mais qui , avec le partenariat qui existe entre le Ministère de la Justice et l’Association peut être appliquée, même si ce n’est qu’a titre expérimental au niveau de la Juridiction de la capitale.
  • V. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste les dispositifs de liberté surveillée pour les enfants en conflit avec la loi ?La mesure de liberté surveillée est une mesure alternative à la détention pour les Enfants en conflit avec la loi. Ce système s’applique pour les enfants ayant commis des délits mineurs (vol, bagarre, escroquerie…). Ces enfants bénéficiaires sont ainsi soumis à des contrôles réguliers par des éducateurs spécialisés, et par une rencontre hebdomadaire avec ces derniers, suivi d’un rapport qui sera remis au juge des enfants responsable du dossier.

    Cette mesure ne peut être décidée par le juge que si l’enfant et les parents sont d’accord pour l’appliquer. A cet effet, l’enfant et la famille sont convoques chaque mois par le juge afin de suivre l’évolution de sa situation.

  • VI. Pensez-vous qu’il soit possible prochainement d’élargir ce dispositif de liberté surveillée sur l’ensemble du territoire ? Si oui, quels seront les étapes de la mise en place pour y parvenir ?C’est peut-être trop ambitieux de dire qu’il nous sera possible prochainement de l’étendre sur tout le territoire mais l’effort à fournir ensemble c’est d’arriver à la mettre en œuvre petit à petit au niveau des grandes juridictions et peut-être plus tard sur tout le territoire. Car il ne faut pas oublier que si cette mesure n’a pas pu être appliquée depuis c’est par manque de moyens, moyens humains d’abord car le texte prévoit que les délégués devant assurer le suivi sont des bénévoles, ensuite moyens financiers car actuellement les éducateurs spécialisés sont payes par l’Association, dont le projet ne peut pas trop s’étendre, or on aurait besoin de plus d’éducateurs que le Ministère de la Justice ne peut encore prendre en charge actuellement.
  • VII. Quelles autres peines alternatives existent pour les ECL à Madagascar ?Il y a notamment les amendes qui sont prévues par le Code pénal, les admonestations envers les enfants irresponsables pénalement, et prochainement après l’adoption de la nouvelle loi devant inclure le travail d’intérêt général, ce dernier devrait figurer parmi les peines alternatives à appliquer en faveur des ECL.

    VIII. Suite à l’état des lieux mené par GD qui vous sera remis, il a été constaté qu’il n’y avait pas de séparation entre les ECL et les majeurs dans certains centres pénitentiaires. Est-il envisageable de mettre en place des centres éducatifs qui regrouperaient les mineurs incarcérés dans certaines régions ?

    Ce serait vraiment l’idéal, mais il faut se rendre à l’évidence que le Ministère de la Justice n’a pas le budget nécessaire pour y parvenir. Aussi, on sollicite vraiment nos partenaires à nous appuyer dans ce sens. Par ailleurs, nos efforts actuellement vont dans le sens de pouvoir vraiment séparer les quartiers des enfants de ceux des majeurs au niveau de tous les établissements pénitentiaires.

    De toutes les façons, nous remercions vivement l’Association « Grandir Dignement » pour toutes les actions entreprises en faveur des enfants en conflit avec la loi à Madagascar. Nous souhaitons vraiment la pérennité desdites actions.

 

Pour plus d’information concernant la direction des réformes législatives: http://www.justice.gov.mg/?page_id=388